Au détour d'une ruelle de Trabzon, des petites tables entourées de minuscules tabourets sont installées le long du mur. Des groupes de tous les âges et de tous les genres sont assis à ces différents îlots.

Trois hommes s'installent à l'une des tables vides. Leurs genoux sont pliés à 45 degrés, ils allument une cigarette en discutant. Quelques instants plus tard, un garçon arrive et prend leur commande. Il revient avec trois petites tasses de thé, chacune avec sa cuillère, sa soucoupe et son carré de sucre sur le côté.

L'histoire du thé en Turquie

En parcourant les pays des routes de la soie, on remarque très vite que le thé a une place fondamentale dans ces régions, plus que le café. En Turquie spécifiquement, le çay est bu partout, à toute heure de la journée.

On voit les genoux de Robin par dessus la mini-table. Sur la table, deux thé dans des verres évasés, sur des soucoupes. Le thé est bien rouge.
Comme tout le monde, on boit du thé à une mini-table.
La devanture d'un magasin de théières. Les théières de toutes sortes, argentées, cuivrées, sont entassées devant et derrière la vitrine.
Magasin de théières à Amasya

Ça a commencé comment ?

L'histoire de l'arrivée du thé en Turquie est intimement liée à celle de la soie. Il est dit que c'est au Ve siècle que le thé a tout d'abord fait son chemin de la Chine à l'Anatolie. À cette époque, les producteurs cuisaient les feuilles puis les compressaient en "briques" compactes, plus faciles à transporter et à échanger. Les marchands s'en servaient alors comme monnaie d'échange contre des chevaux, du musc, de la laine ou du sel.

Durant l'ère ottomane, ce n'était pas le thé, mais le café qui était roi — ou sultan ? Le premier café de l'Empire ottoman a d'ailleurs ouvert ses portes en 1555 à Istanbul durant le règne de Soliman le Magnifique. Ces cafés se sont rapidement multipliés pour devenir de véritables centres communautaires. À la fin du XIXe siècle, il y avait près de 2500 cafés rien qu'à Istanbul.

Suite à la Première Guerre mondiale et à la dissolution de l'Empire ottoman, le café devient cher et parfois difficile à trouver. Le thé connaît alors un nouvel essor, encouragé comme alternative au café.

La place du thé aujourd'hui

De nos jours, c'est la province de Rize qui produit la majorité du thé turc — tout près de là où on se trouve en ce moment, sur les côtes de la mer Noire. En 2019, on y a produit 1.45 millions de tonnes, dont 1.26 millions ont été consommées domestiquement.

On n'est par ailleurs pas dans la diversification : le thé qu'on trouve partout dans le pays est plus ou moins le même, un thé noir non aromatisé avec une couleur ambrée caractéristique. Étant souvent servi en signe d'hospitalité, un verre de thé est soit très abordable, soit offert en fin de repas.

Ça explique peut-être que les Turc·ques soient les plus grands buveurs·euses de thé au monde — environ 3 kg par personne et par année. Ces chiffres ne nous étonnent pas, on n'en a jamais autant bu que depuis qu'on est là.

Servir le thé turc

Le thé turc se prépare dans un çaydanlık, une théière à deux étages. La partie du haut contient un thé noir très concentré qu'on dilue dans le verre avec l'eau chaude de la partie du bas.

Le thé est habituellement servi dans un petit verre évasé qu'on appelle ince belli — littéralement "à taille mince".

Une théière en métal à deux étages chauffe sur le feu à gaz d'une cuisinière.
Une théière à deux étages
Des théières à deux étages électriques disposées sur un étalage moderne. Elles sont en verre et en plastique.
Aujourd'hui, on fait aussi des théières "modernes" électriques...

La recette

  1. Remplir l'étage du bas de la théière avec de l'eau et mettre à chauffer.
  2. Rajouter les feuilles de thé dans l'étage du haut de la théière.
  3. Verser la moitié de l'eau bouillante dans l'étage du haut (sur les feuilles de thé) et rajouter de l'eau en plus dans l'étage du bas. Empiler les étages et remettre le tout à chauffer.
  4. Lorsque l'eau bout, régler à feu doux pour brasser le tout pendant 10–15 min supplémentaires. Le thé est prêt lorsque les feuilles coulent au fond de la théière.
  5. Servir dans une petite tasse en verre avec le mélange thé (étage du haut), eau (étage du bas) et sucre qui vous plaît.

Vous pouvez ajuster les proportions à votre goût pour obtenir un thé "foncé" (koyu) ou "clair" (açık).

Afiyet ! (À votre santé !)

— clara & robin

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